Lever des fonds, ce n’est pas juste une formalité administrative. C’est un véritable parcours stratégique, long (6 à 12 mois en moyenne), souvent complexe, mais surtout décisif pour l’avenir de votre entreprise. Que vous soyez fondateur d’une startup en hypercroissance ou dirigeant d’une PME en quête de développement, comprendre les étapes de la levée de fonds est essentiel pour éviter les écueils et maximiser vos chances de succès.
Dans cet article, nous vous guidons à chaque étape : de la définition de vos objectifs jusqu’au closing juridique, en passant par la construction du pitch, la recherche d’investisseurs et la négociation.
Phase de préparation stratégique (fondations solides)
Une levée de fonds réussie repose sur des fondations stratégiques robustes. Avant de contacter le moindre investisseur, il est impératif de clarifier vos objectifs, votre timing et la valorisation de votre entreprise. Cette phase, souvent sous-estimée, conditionne pourtant l’ensemble du processus.
Définir l’objectif de la levée : lever oui, mais pour quoi faire ?
Avant de penser au montant à lever, posez-vous la question centrale : pourquoi avez-vous besoin de ces fonds ? Souhaitez-vous accélérer votre croissance, financer un développement produit, pénétrer un nouveau marché, renforcer votre équipe ou tout à la fois ? Cette clarté est essentielle, car les investisseurs ne financent pas une intention floue, mais une vision structurée.
Une fois l’objectif établi, déterminez combien lever. Ici, il ne s’agit pas d’estimer « à la louche ». Vous devez calculer un runway réaliste (18 à 24 mois) en tenant compte de votre cash burn mensuel et des hypothèses de croissance. Cela implique une bonne lecture de vos besoins futurs, mais aussi des scénarios moins favorables.
2. Choisir le bon moment pour lever : tout est question de traction
Savoir quand lever est aussi stratégique que pourquoi. La traction est votre meilleure alliée. Sans preuve concrète de scalabilité (KPI de croissance, récurrence client, usage produit…), votre dossier risque de ne pas passer la première sélection.
Demandez-vous :
- Avez-vous atteint des milestones significatifs ?
- Votre marché montre-t-il des signes d’adhésion ?
- Vos indicateurs financiers et opérationnels sont-ils alignés avec les attentes des investisseurs ciblés ?
Le bon moment, c’est quand votre entreprise peut démontrer un potentiel de retour sur investissement clair. Trop tôt, vous essuierez des refus. Trop tard, vous risquez de manquer des opportunités.
3. Valoriser son entreprise : trouver le juste équilibre
La valorisation est l’un des sujets les plus sensibles d’une levée de fonds. Elle détermine votre pouvoir de négociation, votre dilution, et l’intérêt des investisseurs. Il existe plusieurs méthodes selon votre stade de développement :
- Approche par comparables : utile si vous avez des concurrents cotés ou récemment financés.
- Méthode DCF (Discounted Cash Flow) : adaptée aux entreprises avec des revenus prévisibles.
- Méthode Scorecard : pertinente pour les startups early stage sans historique significatif.
Mais attention : une survalorisation vous ferme des portes, tandis qu’une sous-valorisation vous pénalise à long terme.
Comprenez également les mécanismes de dilution. Lever un million d’euros en cédant 40 % de capital ne vaut pas mieux que 500 K€ pour 10 %, si vous conservez la maîtrise de votre projet et accédez à un bon réseau.
Élaboration du dossier de levée (le fond et la forme)
Une fois les bases stratégiques posées, place à la construction d’un dossier solide, à la fois convaincant sur le fond et impeccable sur la forme. C’est ici que tout se joue : vous devez captiver en quelques minutes, tout en rassurant sur votre capacité d’exécution.
Construire un pitch deck percutant : l’art de convaincre en 10 slides
Le pitch deck est votre carte maîtresse. Il doit capter l’attention, transmettre votre vision et donner envie d’en savoir plus. Un investisseur consacre en moyenne moins de 4 minutes à un premier passage. Chaque slide compte.
Voici les slides indispensables :
- Problème : Quelle douleur client réglez-vous ?
- Solution : Votre proposition de valeur unique.
- Marché : Taille, tendances, opportunités.
- Produit : Fonctionnalités clés, démonstration rapide.
- Business model : Comment gagnez-vous de l’argent ?
- Traction : Clients, revenus, métriques d’usage.
- Go-to-market : Stratégie d’acquisition, partenariats.
- Concurrence : Vos différenciateurs réels.
- Équipe : Qui porte le projet ?
- Roadmap & besoins : Prochaines étapes et montant recherché.
L’objectif n’est pas de tout dire, mais de donner envie d’en savoir plus. Un bon deck est visuel, synthétique, structuré.
Formaliser le business plan et les prévisionnels : la preuve par les chiffres
Le pitch deck donne envie, le business plan rassure. Il complète votre présentation avec des éléments tangibles : stratégie, plan d’action, structure juridique, organisation RH, etc.
Mais surtout, il doit être cohérent avec votre prévisionnel financier :
- Hypothèses claires et réalistes.
- Projections sur 3 à 5 ans (P&L, trésorerie, bilan).
- Plan de financement avec levée incluse.
🛑 Erreur fréquente à éviter : des chiffres trop optimistes sans justification, ou au contraire trop prudents qui suggèrent un manque d’ambition.
Les investisseurs savent que vous ne ferez pas exactement ce que vous projetez. Ce qu’ils jugent, c’est votre capacité à structurer, anticiper et défendre votre vision.
Recherche et qualification des investisseurs
Lever des fonds ne consiste pas à “envoyer son deck à tout le monde”. C’est un travail de ciblage, de qualification et de relationnel. Plus votre approche est fine, plus vous augmentez vos chances de succès… tout en réduisant votre temps de levée.
Identifier les bons investisseurs : tous ne se valent pas
Il existe une grande diversité de profils investisseurs, chacun avec ses objectifs, son ticket moyen, ses secteurs de prédilection, son stade d’intervention. Voici les principales catégories :
- Business angels : souvent anciens entrepreneurs ou cadres dirigeants. Apportent du capital mais aussi du réseau et de l’expérience.
- Fonds de capital-risque (VC) : interviennent sur des tours plus structurés, à partir de 500 K€ à plusieurs millions.
- Family offices : recherchent des placements plus patrimoniaux, souvent sur des projets matures ou peu volatils.
- Fonds corporate (CVC) : rattachés à de grands groupes, ils investissent dans des projets stratégiquement liés à leur cœur d’activité.
Votre objectif ? Identifier ceux qui financent des projets comme le vôtre (secteur, stade, taille de tour) et qui partagent votre vision.
Bonus : accédez à notre annuaire d’investisseurs filtrable par ticket, secteur et zone géographique, avec les critères de sélection mis à jour.
Prendre contact et pitcher efficacement : créer une connexion, pas une transaction
Un investisseur ne vous finance pas parce que vous avez “un bon projet” mais parce qu’il croit en votre équipe, votre vision et votre capacité à délivrer. C’est pourquoi le premier contact doit être soigné.
Commencez par un mail d’introduction concis, personnalisé, avec un sujet accrocheur et une pièce jointe claire (deck ou one-pager).
📩 Exemple de mail efficace :
Objet : Opportunité sérieuse dans [secteur] – startup avec [traction]
Bonjour [Nom de l’investisseur],
Je me permets de vous contacter car votre intérêt pour [secteur ou typologie de projet] correspond parfaitement à notre startup, [Nom], qui développe [pitch en une phrase].
Nous avons atteint [exemples de traction : MRR, clients, usage…] et cherchons à lever [montant] pour [objectif].
Je vous joins notre deck et serais ravi d’échanger si cela suscite votre intérêt.
Bien à vous,
[Signature]
Ensuite, soignez vos relances : pas trop rapprochées, mais régulières et apportant de la valeur (nouvelle traction, closing d’un client, évolution produit…).
Négociation & formalisation
Vous avez convaincu des investisseurs. Félicitations ! Mais la levée n’est pas encore bouclée. Place aux discussions juridiques, financières et contractuelles. C’est ici que tout se concrétise… ou se complique. La rigueur et l’anticipation sont vos meilleurs alliés.
Lettre d’intention (LOI) : poser les bases de l’accord
Une fois l’intérêt confirmé, l’investisseur formalise son engagement par une LOI (Letter of Intent). Ce document, non contraignant juridiquement, encadre les premières conditions du deal :
- Montant investi
- Valorisation envisagée
- Clauses spécifiques (liquidité, gouvernance, droits préférentiels…)
- Exclusivité des négociations
- Période de due diligence
C’est un moment clé, car même s’il ne lie pas formellement les parties, il conditionne le rapport de force pour la suite. À ce stade, entourez-vous d’un conseil juridique habitué aux levées de fonds.
Due diligence : l’audit à ne surtout pas sous-estimer
Les investisseurs n’investissent pas sans vérifier. La due diligence est une phase d’audit approfondi sur votre entreprise. Elle porte sur :
- Juridique : statuts, pactes, litiges en cours
- Financier & comptable : bilans, dettes, prévisionnels
- Propriété intellectuelle : dépôts, contrats tech
- RH : contrats, structuration de l’équipe
- Opérationnel : organisation, roadmap, tech stack
Une préparation rigoureuse est indispensable pour éviter tout ralentissement. Tout retard ou flou peut faire capoter la levée.
Term sheet & pacte d’actionnaires : encadrer la relation sur la durée
Vient ensuite la term sheet : un document structuré qui fixe les termes définitifs du deal. Il est généralement contraignant.
Vous y retrouverez les clauses les plus sensibles :
- Anti-dilution
- Liquidation préférentielle
- Droit de sortie conjointe (tag along, drag along)
- Gouvernance : composition du board, droit de veto
Ce document sera la base du pacte d’actionnaires, qui régira les relations entre fondateurs et investisseurs post-levée.
Faites impérativement appel à un avocat spécialisé en venture capital. C’est un investissement, pas une dépense.
Closing & formalités juridiques
C’est le moment tant attendu : la levée de fonds entre dans sa phase finale. Mais attention, le closing n’est pas une simple signature : c’est une série de démarches techniques, administratives et légales à bien maîtriser pour éviter les erreurs coûteuses.
Closing de l’opération : officialisation et transfert des fonds
Le closing désigne le moment où toutes les conditions suspensives ont été levées.
Les étapes à suivre :
- Signature des documents juridiques définitifs (pacte, statuts modifiés, procès-verbal…)
- Versement des fonds sur le compte de l’entreprise
- Mise à jour du capital social et du registre des mouvements de titres
- Communication interne (notamment envers l’équipe et les partenaires clés)
Enregistrement administratif : l’étape souvent négligée
Le travail ne s’arrête pas à la signature. Vous devez finaliser l’opération auprès des administrations :
- Rédiger et tenir une Assemblée Générale Ordinaire (AGO) pour acter l’augmentation de capital
- Établir un bulletin de souscription pour chaque investisseur
- Mettre à jour les statuts de la société
- Déposer le dossier au greffe du tribunal de commerce
Ces formalités peuvent sembler secondaires, mais elles conditionnent la validité légale de l’opération. Ne les négligez surtout pas.
Post-levée : comment bien capitaliser sur vos fonds
La signature ne marque pas la fin, mais le début d’un nouveau cycle. Beaucoup d’entrepreneurs lèvent des fonds… et s’épuisent ensuite faute d’avoir anticipé l’après. La vraie réussite d’une levée ne se mesure pas au montant levé, mais à l’impact concret qu’elle génère sur la croissance de votre entreprise.
Communication post-levée : valoriser le momentum
Dès le closing, il est crucial de maîtriser votre communication :
- Communiqué de presse : mettez en avant le montant levé, vos ambitions, les investisseurs impliqués.
- Post LinkedIn et réseau : montrez la dynamique, remerciez vos soutiens, suscitez l’adhésion.
- Communication interne : informez votre équipe en toute transparence, mobilisez-les autour des nouvelles priorités.
Cette étape booste votre crédibilité, attire des talents, des clients et… d’autres investisseurs.
Intégration des investisseurs au board : trouver le bon équilibre
Les investisseurs ne sont pas que des financeurs. Ils deviennent des partenaires stratégiques. Leur intégration doit être pensée pour maximiser la valeur qu’ils apportent, sans nuire à votre autonomie.
Quelques bonnes pratiques :
- Définir des règles claires de gouvernance (comité stratégique, fréquence des réunions, reporting).
- Anticiper les conflits d’intérêt ou les désalignements de vision.
- Valoriser leur apport en réseau, expertise marché ou vision scaling.
Un investisseur bien intégré, c’est un levier puissant pour structurer votre croissance.
Suivi des KPIs et accountability : piloter comme un pro
Une levée de fonds engage votre entreprise à délivrer. Il ne s’agit pas seulement de « brûler du cash » plus vite. Vous devez suivre, démontrer, ajuster.
Voici ce que vous devez mettre en place dès les premières semaines :
- Un dashboard de suivi mensuel avec vos KPIs clés : croissance MRR, churn, CAC, burn rate, cash disponible.
- Un reporting structuré à adresser régulièrement à vos investisseurs.
- Un plan d’action glissant sur 6 mois, pour garder le cap malgré les aléas.
Si vous n’avez pas encore d’outil adapté, commencez avec notre template de suivi post-levée prêt à l’emploi, à adapter selon votre business model.
Conclusion & appel à l’action
La réussite d’une levée de fonds ne tient ni à la chance ni à l’improvisation. Elle repose sur une vision claire, un dossier solide, des partenaires bien choisis… et une exécution sans faille. En suivant avec rigueur les étapes d’une levée de fonds — de la préparation stratégique jusqu’au suivi post-closing — vous augmentez vos chances de convaincre et de construire une croissance durable.
Chez Linkera, nous mettons à votre disposition les outils, les ressources et l’accompagnement expert pour vous guider à chaque phase.
📩 Prêt à passer à l’action ? échangez avec un analyste pour faire le point sur votre projet de levée.